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Recommandations européennes de prise en charge des GIST (ESMO Guidelines)

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RECOMMANDATIONS EUROPEENNES DE PRISE EN CHARGE DES GIST

INCIDENCE

Les Tumeurs Stromales Gastro-Intestinales (GIST) sont des tumeurs rares pour lesquelles l'incidence est estimée à 1.5/100 000 personnes par an. Cette estimation ne concerne que les GIST avérés et ne tient pas compte des lésions microscopiques en sommeil (autrement appelées "microGIST") que l'on pourrait identifier, sur le plan pathologique, chez une large partie de la population.

L'âge médian au diagnostic se situe aux environs de 50-60 ans pour la plus grande majorité mais les GIST peuvent survenir à n'importe quel âge de la vie.

La survenue chez l'enfant est particulièrement rare, bien que les GIST pédiatriques représentent un sous-groupe bien distinct, marqué par :

  • Une prédominance féminine
  • L'absence de mutations de KIT/PDGFRa (on parle alors de GIST "Wild-Type")
  • Des lésions gastriques multifocales
  • D'éventuelles métastases au niveau des ganglions lymphatiques

Plusieurs syndrômes ont un lien avec les GIST :

  1. La triade de Carney : combinant la présence de GISTs principalement gastriques, de paragangliomes, de chondromes pulmonaires et pouvant survenir à tous les âges de la vie, ce qui rend le diagnostic particulièrement difficile à établir chez les GIST pédiatriques Wild-Type.
     
  2. La neurofibromatose de type 1 : marquée par la présence de GISTs Wild-Type, principalement localisées au niveau de l'intestin grêle
     
  3. Le syndrôme de Carney-Stratakis : caractérisé par des mutations germinales de SDHB, SDHC, SDHD, et conduisant à une diade associant GIST et paragangliome.
     

Des cas de GIST familiaux avec des mutations germinales autosomiques dominantes de KIT ou de PDGFRa, et présentant des GIST multiples à un âge précoce, ont été rapportés.

DIAGNOSTIC

Lorsque de nodules sous-muqueux oesophago-gastriques ou duodénaux mesurant moins de 2 cm sont détectés, la biopsie par endoscopie peut être difficile à réaliser et l'excision par laparoscopie ou laparotomie peut alors devenir le seul moyen d'obtenir un diagnostic histologique. Si le diagnostic de GIST est confirmé, beaucoup de ces petits nodules seront classés comme étant à faible risque ou comme des entités dont la signification clinique demeure incertaine. Par conséquent, l'approche standard pour ces patients consiste en une évaluation par échographie endoscopique associée à une surveillance annuelle, l'exérèse devant être réservée pour les patients symptomatiques ou présentant une augmentation du volume tumoral. Sinon, il peut être discuté avec le patient de procéder à une évaluation histologique qui reposerait également sur l'âge, l'espérance de vie et la co-morbidité. Si la surveillance est choisie, une politique de surveillance optimale basée sur des éléments concrets fera alors défaut. La logique voudrait qu'un premier contrôle à court terme (à 3 mois) soit réalisé puis, en l'absence de signe de progression manifeste, qu'un calendrier de suivi plus souple soit ensuite défini.

Pour les petites tumeurs ayant un diagnostic de GIST histologiquement prouvé, le traitement standard est la chirurgie sauf pour les patients présentant un risque de morbidité majeur.  Autrement, en cas de GIST à faible risque de rechute, un suivi régulier de la lésion peut être discuté avec le patient. Cependant, pour les nodules du rectum ou de la cavité recto-vaginale, l'approche standard est la biopsie/exérèse après évaluation par échographie ce, quel que soit la taille de la tumeur car le niveau de risque à cet endroit est plus élevé que pour les autres localisations et la chirurgie locale particulièrement délabrante. Pour des lésions de petite taille et dans le cas de contextes cliniques spécifiques, la mise en place d'une politique de suivi peut être une option à discuter avec le patient.

Pour les nodules mesurant 2 centimètres ou plus, l'approche standard est la biopsie/excision car, s'il s'agit de GISTs, ils sont alors associés à un risque plus élevé de récidive. En cas de nodule abdominal ne se prêtant pas à l'évaluation endoscopique, l'exérèse par laparoscopie ou par laparotomie devient alors l'approche standard. En présence d'une masse, particulièrement si la chirurgie doit consister en la résection de plusieurs viscères, la ponction-biopsie des différents sites est alors le standard. Ces ponction-biospies peuvent être guidées sous écho-endoscopie ou sous scanner. Cela doit permettre au chirurgien d'adapter son approche en fonction du diagnostic histologique et d'éviter la chirurgie pour les maladies qui n'en ont pas besoin ( lymphomes, fibromatose mésentérique, tumeurs germinales). Le risque de contamination péritonéale est infime si la procédure est scrupuleusement respectée. C'est pourquoi il est préférable que les lésions à risque (masses cystiques) soient uniquement biopsiées dans des centres spécialisés. L'excision immédiate par laparoscopie ou par laparotomie est une alternative à envisager au cas par cas, particulièrement si la chirurgie est limitée. En présence d'une maladie métastatique avérée, la biopsie du foyer métastatique s'avère suffisante, la laparotomie à visée diagnostique n'étant généralement pas nécessaire. L'échantillon tumoral doit alors être fixé dans du formol tamponné 4% (La fixation Bouin ne doit pas être utilisée, celle-ci ne permettant pas l'analyse moléculaire).

D'un point de vue pathologique, le diagnostic de GIST repose sur la morphologie et l'immuno-histochimie (CD117 et/ou DOG1). Environ 5% des GISTs sont CD117-négatif. L'indice mitotique présente une valeur pronostique et doit être exprimée comme le nombre de mitoses sur une surface totale de 5mm2, ce qui équivaut conceptuellement à 50 grands champs. L'analyse mutationnelle pour les mutations connues des gènes KIT et PDGFRa peut, en cas de doute, confirmer le diagnostic de GIST (Particulièrement pour les GIST CD117/DOG1-négatifs). Cette analyse ayant une valeur prédictive de la sensibilité aux thérapies ciblées, ainsi qu'une valeur pronostique, son inclusion dans le bilan diagnostic de tous les GISTs doit être considérée comme une pratique standard (avec une possible exclusion des GIST non rectaux inférieurs à 2 cm, peu susceptibles de nécessiter un traitement médical). La centralisation des analyses mutationnelles dans un laboratoire (possiblement inscrit dans un programme d'assurance qualité externe et ayant une expertise de la maladie) pourrait s'avérer utile.

Un second avis émis par un médecin pathologiste expert est recommandé dans tous les cas lorsque le diagnostic de GIST a été posé en dehors d'un centre de référence.

La collecte de tissus frais ou congelés est encouragée car de nouvelles évaluations moléculaires pourraient être réalisées ultérieurement, dans l'intérêt du patient. Un formulaire de consentement éclairé est à prévoir pour les banques de tumeurs, afin de faciliter la recherche et autoriser de nouvelles analyses, dans la mesure de ce les directives nationales et internationales permettent.

CLASSIFICATION ET EVALUATION DES RISQUES

La classification TNM présente plusieurs limites et n'est donc pas recommandée.

Les facteurs pronostiques sont : l'indice mitotique, la taille de la tumeur et la localisation (les GISTs gastriques ayant un meilleur pronostic que les GIST de l'intestin grêle ou du rectum). Les marges chirurgicales, de même que la rupture tumorale, constituent des facteurs additionnels pouvant impacter sur le prognostic. Aussi, les ruptures tumorales, qu'elles surviennent avant ou pendant la chirurgie, doivent être rapportées dans la mesure où elles constituent un facteur pronostic défavorable.

La classification des risques la plus largement utilisée est celle de "l'Institut de Pathologie des Forces Armées" (Armed Forces Institute of Pathology) comprenant : la localisation de la tumeur d'origine, l'indice mitotique et la taille de la tumeur ; qui sont les trois principaux facteurs pronostiques pour les GISTs localisés. L'estimation des risques pour les sous-groupes est basée sur des données limitées mais cette classification propose une meilleure distinction des différents niveaux de risques que celle développée par le National Health Institute (NHI) en 2002. Ceci a été corrélé au pronostic dans une étude épidémiologique ayant démontré que la catégorie "Haut risque" avait un plus mauvais pronostic que les autres tandis que les catégories "Très faible risque" et "Faible risque" bénéficiaient d'un pronostic des plus favorables. Dans la plupart des séries basées sur la population, la catégorie "Risque intermédiaire" de la classification du NHI ne permettait pas de distinguer les patients avec un pronostique défavorable. Un nomogramme utilisant les trois critères a été développé dans une autre série. L'utilisation de ces outils doit permettre d'apprécier que l'indice mitotique et la taille de la tumeur sont des variables continues non-linéaires, de sorte que les seuils puissent être interprétés de manière raisonnable.

La rupture tumorale est un facteur pronostique hautement défavorable, à tel point qu'elle tend à bouleverser les facteurs pronostiques conventionnels.

L'index mitotique et la taille de la tumeur sont inclus comme des variables continues non-linéaires, tandis que la rupture tumorale est un facteur pronostique qui vient s'ajouter à la localisation de la tumeur. Ces données ont été validées par rapport à des séries de référence.

Jusqu'ici, le statut mutationnel n'a été intégré dans aucune classification des risques, bien que certains génotypes aient une histoire naturelle particulière.

PROCEDURES POUR LE  BILAN D'EXTENSION

Les procédures pour le bilan d'extension tiennent compte du fait que la plupart des récidives surviennent au niveau du foie et du péritoine. Le scanner abdomino-pelvien est une investigation de choix pour le bilan et le suivi.  L'IRM ou encore l'échographie de contraste peuvent être des alternatives. Pour les GIST rectaux, l'IRM fournit une meilleure bilan pré-opératoire. Un scanner ou des radios du thorax associé à un bilan sanguin de routine complètent le bilan d'extension des patients asymptomatiques. L'évaluation de la fixation du FDG par le biais d'un PETscan, d'un scanner ou d'une IRM peut s'avérer utile. Principalement lorsque la détection précoce de la réponse tumorale à une thérapie ciblée est déterminante.

PRISE EN CHARGE

La planification d'une prise en charge multi-disciplinaire (impliquant les pathologistes, les radiologues, les chirurgiens et les oncologues médicaux) - telle que celle proposée dans les centres de référence pour les sarcomes et les GIST et/ou au sein des réseaux de référence partageant une expertise pluri-disciplinaire et traitant un nombre élevé de patients par an - est requise.

Prise en charge de la maladie localisée

Le traitement standard des GIST localisés est la résection chirurgicale complète, sans la dissection des ganglions lymphatiques cliniquement négatifs. Si une exérèse laparoscopique est envisagée, la technique doit respecter les principes d'une chirurgie carcinologique.  Le recours à la laparoscopie est clairement déconseillé chez les patients présentant des lésions de grande taille, en raison des risques de rupture tumorale, associée à un risque très élevé de récidive. La chirurgie de type R0 (avec marges saines sans résidu tumoral) doit être l'objectif à atteindre.

Lorsque la chirurgie de type R0 induit des séquelles fonctionnelles majeures et que le traitement pré-opératoire n'a pas montré l'efficacité espérée ou n'est pas indiqué pour le patient, une chirurgie de type R1(avec marges chirurgicales contenant quelques résidus tumoraux) peut alors être discutée avec le patient. Ceci est d'autant plus vrai pour les lésions à faible risque de récidive en l'absence de preuves formelles selon lesquelles une chirurgie de type R1 serait associée à une moins bonne survie globale.

Si une chirurgie R1 a été réalisée, une seconde résection peut alors être envisagée sous réserve que le site d'origine de la lésion puisse être atteint et que celle-ci n'entraine pas de séquelles fonctionnelles majeures.

Comme l'indiquent les classifications actuelles, le risque de récidive peut être substanciel. Une étude randomisée a démontré que 3 ans de traitement adjuvant par imatinib amélioraient la Survie sans récidive et la survie globale par rapport à une prescription de 1 an chez les patients classés à haut risque de rechute. Auparavant, une étude contrôlée contre placebo avait démontré que la prescription d'imatinib sur une année était en mesure de prolonger la Survie sans récidive chez les patients présentant une tumeur localisée de moins de 3 cm et ayant bénéficié d'une chirurgie complète. La prescription de traitement adjuvant ne doit pas être envisagée pour les lésions à faible risque mais elle peut néanmoins être discutée pour les patients à risque intermédiaire.

La recherche du statut mutationnel est indispensable à la prise de décision concernant la prescription d'un traitement adjuvant. En fait, il existe un consensus selon lequel les GIST présentant une mutation D842V du PDGFRa ne doivent pas recevoir de thérapie adjuvante, compte-tenu de l'insensibilité de ce génotype à l'imatinib aussi bien in vitro qu'in vivo. Au vu des données encourageant l'administration d'une dose plus élevée d'imatinib (800mg/j) pour les GIST avancés présentant une mutation du gène KIT au niveau de l'exon 9, nombre de cliniciens ont également recours à ce dosage en situation adjuvante pour les patients mutés au niveau de l'exon 9. Des problèmes de règlementation devraient cependant mettre un frein à cette pratique qui n'est actuellement soutenue par aucune étude contrôlée dans le cadre d'un traitement adjuvant. Il n'existe pas de consensus selon lequelles GIST "Wild-Type" devraient recevoir une thérapie adjuvante. Cela s'explique par leur faible sensibilité à l'imatinib, ainsi que par leur histoire naturelle particulière qui rend ces tumeurs généralement plus indolentes, particulièrement dans le cas des GIST syndromiques. L'analyse des sous-groupes dans les différents essais randomisés en cours est trop limitée pour que l'on puisse fournir suffisamment d'éléments probants sur ce sujet. Une coopération européenne et internationale est cruciale pour déterminer les bonnes pratiques de prise en charge des cas de GIST pédiatriques extrêmement rares.

Lorsque la tumeur se rompt au cours de la chirurgie, les cellules tumorales se disséminent dans la cavité péritonéale, ce qui laisse présumer d'une future extension péritonéale de la maladie. Ce schéma place le patient dans une contexte de très haut risque de rechute au niveau du péritoine et justifie donc la prescription d'une thérapie adjuvante. La durée optimale du traitement dans ces cas précis demeure inconnue, compte-tenu de l'incertitude quant à savoir si ces patients doivent être considérés comme métastatiques d'emblée.

Si une chirurgie de type R0 n'est pas réalisable, ou si le même résultat peut être atteint par une chirurgie conservatrice/moins mutilante après cytoréduction (cela vaut pour la gastrectomie totale et toutes les autres procédures majeures), un pré-traitement par imatinib est alors recommandé. Cette règle peut également s'appliquer si le chirurgien pense que la conduite chirurgicale peut être menée de manière plus sûre après cytoréduction (le risque d'hémorragie ou de rupture tumorale est diminué). La chirurgie est réalisée au temps de réponse maximale, soit généralement après 6 à 12 mois de traitement. L'analyse mutationnelle est primordiale car elle permet d'exclure d'emblée les génotypes les moins sensibles ou résistants  (Mutations PGDFRa D842V) d'une thérapie sous imatinib et permet d'ajuster le dosage pour les mutations de l'exon 9. Une évaluation précoce de la réponse tumorale est obligatoire afin que la chirurgie ne soit pas retardée dans le cas d'une maladie ne répondant pas au traitement. En l'absence d'analyse mutationnelle, l'imagerie fonctionnelle peut permettre d'évaluer la réponse tumorale en quelques semaines. Il existe très peu de données permettant de définir avec exactitude, le moment auquel le patient doit interrompre l'imatinib avant la chirurgie. Toutefois, il peut être interrompu en toute sécurité 2 à 3 jours avant la chirurgie et peut être repris très rapidement après la chirurgie.

Prise en charge de la maladie métastatique

Chez les patients présentant une maladie localisée avancée inopérable et les patients métastatiques, le traitement standard est l'imatinib. Cela s'applique également aux patients métastatiques ayant bénéficié d'une ablation complète de leurs lésions, même si la chirurgie en tant qu'approche thérapeutique première dans les GIST métastatiques, n'est pas recommandée. La dose standard d'imatinib est de 400mg/j. Cependant, des données ont démontré que les patients présentant une mutation du KIT au niveau de l'exon 9 bénéficient d'une meilleure survie sans progression avec un dosage plus élevé (800mg/j) qui est donc le traitement standard pour ce sous-groupe.

Le traitement doit être poursuivi sans limitation de durée étant donné que l'interruption thérapeutique est généralement suivie d'une progression tumorale relativement rapide dans la plupart des cas, même lorsque les patients ont pu bénéficier d'une résection chirurgicale complète de leurs lésions.

Une fois le traitement commencé, le patient doit être informé de l'importance de l'observance thérapeutique,  des interactions possibles avec d'éventuels traitements concomittants ou aliments ; et des modalités de gestion des effets secondaires. L'intensité du dosage doit pouvoir être maintenue par une gestion appropriée des effets secondaires et par l'application d'une politique raisonnable de réductions de dose et d'interruption en cas de toxicité excessive persistante.

Une étroite surveillance de la réponse tumorale doit être mise en place dès les premières phases du traitement. Le suivi doit être poursuivi tout au long du traitement, sachant que le risque de progression secondaire persiste dans le temps. Cependant, en cas de réponse objective, la surveillance peut être assouplie avec le temps (de 3 à 6 mois), spécialement après 5 ans de réponse, en raison de données préliminaires qui suggèrent une diminution du risque de récidive.

Des données rétrospectives suggèrent que les concentrations plasmatiques sous-optimales d'imatinib sont associées à un mauvais pronostic. Des études plus poussées seraient néanmoins nécessaires pour confirmer ces données de manière prospective. En plus de l'intérêt potentiel qu'elle présente dans l'ajustement des doses d'imatinib, l'évaluation plasmatique peut s'avérer utile pour : le suivi des patients recevant des traitements concomittants susceptibles d'entrainer un risque majeur d'interactions ; l'observation de toxicités inattendues ;  conduire le médecin à augmenter le dosage à 800mg/j en cas de progression à 400mg/j.

Il a été démontré que la résection complète des lésions métastatiques résiduelles était corrélée à un bon pronostic, à condition que le patient réponde à l'imatinib. Il reste cependant à démontrer si cela est dû à la chirurgie ou tient à la sélection des patients. Aucune étude randomisée sur ce sujet n'a été réalisable à ce jour. Par conséquent, l'approche chirurgicale des lésions métastatiques doit être individualisée et discutée avec le patient, en cas d'incertitude.

L'exérèse chirurgicale de la maladie en progression n'est soutenue par aucune des séries publiées, mais la chirurgie d'une progression limitée telle que celle d'un nodule au sein d'une masse, a été associée à un intervalle de survie sans progression équivalent à celui obtenu en seconde ligne de traitement sous sunitinib. Par conséquent, la chirurgie peut se révéler être une option palliative chez le patient présentant une progression limitée de sa maladie et continuant de recevoir de l'imatinib. Les procédures non-chirurgicales (traitements localisés tels que la radio-fréquence) doivent être étudiés avec précaution.

En cas de progression tumorale sous 400mg/j d'imatinib, l'approche standard consiste en une augmentation du dosage à 800mg/j, sauf pour les mutations réputées insensibles à l'imatinib. L'augmentation du dosage est particulièrement utile dans : les GIST présentant une mutation du gène KIT au niveau de l'exon 9 (si le dosage maximum n'a pas été prescrit dès le départ) ; en cas d'une modification de la pharmacocinétique dans le temps ; ou encore pour tenter de contrer certaines altérations moléculaires secondaires.

Les fausses progressions à l'imagerie doivent être écartées en s'appuyant sur les profils de réponse présentés ci-dessous. De même, la mauvaise observance thérapeutique du patient, ainsi que les interactions médicamenteuses avec d'autres traitements concomittants doivent être écartés comme possibles causes de la progression tumorale.

En cas de progression ou d'intolérance rare à l'imatinib (après plusieurs tentatives de gestion des effets secondaires, notamment sous les conseils d'experts), le traitement standard de seconde ligne est le sunitinib. Ce médicament a démontré son efficacité en terme de Survie sans progression avec un schéma thérapeutique basé sur 4 semaines de traitement, suivies de 2 semaines d'interruption. Des données ont également rapporté qu'un schéma thérapeutique continu avec un dosage quotidien moins élevé (37.5 mg) pourrait se révéler tout aussi efficace et bien toléré, même si aucune comparaison formelle n'a été réalisée dans le cadre d'un essai clinique randomisé. Ce schéma de prescription peut donc être considéré comme une option dans le cadre d'une approche thérapeutique individualisée.

Après échec au sunitinib, une étude randomisée placebo contrôlée a démontré que le regorafenib était en mesure de prolonger la survie sans progression. Lorsqu'elle est disponible sur le marché, cette thérapie est recommandée comme troisième ligne de traitement chez les patients ayant échoué successivement à l'imatinib puis au sunitinib.

Les patients ayant des GIST métastatiques doivent être considérés comme des candidats potentiels aux essais cliniques proposant des thérapies innovantes ou des combinaisons thérapeutiques.

Il existe des preuves anecdotiques selon lesquelles les patients ayant déjà progressé sous imatinib pourraient obtenir un bénéfice thérapeutique en recevant de nouveau cette même molécule. De même, maintenir la pression thérapeutique à l'aide d'un agent anti-tyrosine kinase, même en cas de progression, peut aider à ralentir la progression de la maladie à défaut de pouvoir la stopper (si aucune autre option n'est envisageable à ce moment). Par conséquent, représcrire ou poursuivre un traitement anti-tyrosine kinase que le patient aurait déjà reçu par le passé est une option envisageable chez les patients en situation de progression. En revanche,  l'utilisation de combinaisons d'agents anti-tyrosine kinase en dehors d'un essai clinique ne doit pas être encouragé, en raison du potentiel de toxicité considérable.

EVALUATION DE LA REPONSE TUMORALE

Pour la plupart des patients, l'activité anti-tumorale se traduit par une réduction du volume de la tumeur mais il arrive que certains patients ne présentent que des changements de la densité tumorale au scanner, ou que ces changements précèdent une diminution plus tardive de la tumeur.

Ces changements d'apparence à l'imagerie doivent être considérés comme une réponse tumorale, notamment

  • l'augmentation du volume de la tumeur, qui doit être considérée comme une réponse objective lorsque celle-ci est associée à une diminution de sa densité au scanner.
     
  • l'apparition de "nouvelles lésions" dont la survenue s'explique par le fait qu'elles deviennent plus flagrantes alors que leur densité diminue.

 

Par conséquent, la taille et la densité de la tumeur au scanner, de même que des changements significatifs à l'IRM ou à l'échographie de contraste, doivent être considérés comme des critères de réponse tumorale.

Le PET-Scan présente une meilleure sensibilité pour l'évaluation précoce de la réponse tumorale et peut s'avérer utile en cas de doutes, ou lorsque la prédiction précoce de la réponse tumorale est indispensable (en vue d'un traitement/cytoréduction pré-opératoire). Cependant, une petite proportion de GISTs n'absorbe pas le produit de contraste utilisé pour le PET-Scan.

L'absence de progression tumorale (ou stabilisation) après plusieurs mois de traitement équivaut à une réponse objective. En revanche, la progression tumorale ne doit pas être accompagnée de changements du volume tumoral. De même, une augmentation de la densité au sein de lésions tumorales présume d'une progression. Un des profils typiques de progression est l'apparition d'un "nodule dans une masse", par lequel une portion d'une lésion répondeuse devient hyperdense.

SUIVI

Il n'y a pas de données publiées précisant la politique de suivi de routine des patients atteints de GIST localisés traités par chirurgie. Les rechutes surviennent le plus souvent au niveau du foie et/ou du péritoine (les autres sites métastatiques, comme les os, étant plus rares). L'indice mitotique est susceptible d'indiquer la vitesse à laquelle la rechute pourrait survenir. L'évaluation du risque basée sur l'indice mitotique, la taille et la localisation de la tumeur peut s'avérer utile dans le choix de la politique de suivi de routine. Les patients classés à "Haut risque" rechutent généralement entre 1 et 2 ans après l'arrêt de la thérapie adjuvante. Les patients à faible risque pourraient rechuter plus tard, bien que cela soit peu probable. En tout état de cause, le planning de suivi de routine varie selon les institutions.

Les critères du planning optimal de suivi ne sont pas définis. A titre d'exemple, dans certaines institutions, les patients à "Haut-risque" ont un scanner ou une IRM de routine tous les 3-6 mois durant les 3 années de traitement adjuvant (avec un suivi clinique plus étroit en raison des modalités de gestion des effets secondaires). Sauf contre-indication, ce suivi se poursuit tous les 3 mois pendant 2 ans à compter de l'interruption de la thérapie adjuvante, puis tous les 6 mois jusqu'à 5 ans après arrêt de la thérapie, puis tous les ans pendant 5 ans supplémentaires.

Pour les tumeurs à faible risque, l'utilité d'un suivi de routine demeure inconnue. S'il est mis en place, il doit consister en un scanner ou une IRM tous les 6-12 mois pendant 5 ans.

Les GIST à très faible risque n'ont probablement pas besoin d'un suivi de routine, même si le risque de récidive ne peut pas être considéré comme tout à fait nul.

L'exposition aux rayons X étant un facteur à prendre en considération, l'IRM abdominale peut être une alternative au scanner.

NOTE

Ces recommandations de pratique clinique ont été élaborées à partir d'une réunion de consensus organisée par l'ESMO à Milan (Italie) en janvier 2012, puis affinées ultérieurement. Cette réunion impliquait des experts de la communauté des groupes de recherche sarcomes européens, des réseaux d'excellence sarcomes et des représentants de l'ESMO. Leurs noms sont indiqués ci-dessous. Le texte reflète le consensus global obtenu entre les différents participants, bien que certains ne partagent pas forcément les mêmes visions que ce qui peut y être rapporté. Le panel a travaillé à partir des recommandations de l'ESMO des années précédentes, dont la paternité doit être reconnue.

Consensus Panel ESMO Guidelines 2012

Jean-Yves Blay (France), Carl Blomqvist (Finland), Sylvie Bonvalot (France), Joannis Boukovinas (Grèce), Paolo G. Casali (Italie), Enrique De Alava (Espagne), Angelo Paolo Dei Tos (Italie), Uta Dirksen (Allemagne), Florence Duffaud (France), Mikael Eriksson (Suède), Alexander Fedenko (Russie), Andrea Ferrari (Italie), Stefano Ferrari (Italie), Xavier Garcia Del Muro (Espagne), Hans Gelderblom (Belgique), Robert Grimer (Grande-Bretagne), Alessandro Gronchi (Italie), Kirsten Sundby Hall (Norvège), Bass Hassan (Grande-Bretagne), Pancras Hogendoorn (Pays-Bas), Peter Hohenberger (Allemagne), Rolf Issels (Allemagne), Heikki Joennsu (Finland), Lorenz Jost (Suisse), Leo Kager (Autriche), Axel Le Cesne (France), Serge Leyvraz (Suisse), Javier Martin (Espagne), Ofer Merimski (Israel), Toshiro Nishida (Japon), Piero Picci (Italy), Peter Reichardt (Allemagne), Piotr Rutkowski (Pologne), Marcus Schlemmer (Allemagne), Stefan Sleijfer (Pays-Bas), Silvia Stacchiotti (Italie), Antoine Taminiau (Pays-Bas), Eva Waldermann (Allemagne).

REMERCIEMENTS

L'ESMO remercie Barbara Doré, Estelle Lecointe et Roger Wilson (Sarcoma Patients Euro Net), représentants des associations de patients, pour leur participation en tant qu'observateurs à cet événement.