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GIST et traitement adjuvant : "Traiter ou ne pas traiter ?" le dilemne des patients du bras "surveillance" de l'essai 62024 de l'EORTC évaluant traitement versus surveillance

Interview du Pr.Jean-Yves Blay sur la pertinence d’une prescription adjuvante d’Imatinib dans un délai supérieur à 3 mois après la chirurgie …

Estelle LECOINTE : Le 19 juin dernier, l’EMEA approuvait officiellement la prescription d’Imatinib en prévention de la récidive chez les patients adultes présentant un risque significatif de rechute après résection chirurgicale de Tumeurs Stromales Gastro Intestinales (GIST).

A la suite de ce communiqué officiel, certains patients inclus dans le bras surveillance de l’essai européen 62024 depuis plusieurs mois, et potentiellement inquiets pour leur devenir, nous ont interrogés sur les conditions d’éligibilité à cette nouvelle prescription et nous ont notamment posé les questions suivantes :

"Patient à haut risque inclus depuis plusieurs mois dans le bras surveillance de l’essai européen EORTC 62024 :


• Vais-je pouvoir bénéficier de la prescription adjuvante d’Imatinib sur la base des recommandations européennes ?

• Dois-je demander à sortir de l’étude européenne afin de pouvoir bénéficier d’une prescription adjuvante ?

• Puis-je imposer à mon cancérologue de me prescrire de l’Imatinib dans ce cadre particulier ?"

Afin de tenter d’apporter des éléments de réponses à ces questions cruciales, pouvez-vous nous éclairer sur la pertinence d’une prescription adjuvante d’Imatinib dans un délai supérieur à 3 mois après la chirurgie ?

Pr. Jean-Yves BLAY, Président du Conseil scientifique de l'A.F.P.G. "Ensemble contre le GIST" :

L’arrivée de l’imatinib en situation adjuvante constitue un progrès sensible dans la prise en charge des GIST en situation localisée. Si les questions de doses, de durée de traitement, de sélection des groupes à risque, d’adaptation aux mutations restent largement posées, une autre question se fait jour actuellement pour des patients récemment opérés, mais ayant dépassé la période des 3-4 mois post opératoire :

"Faut il donner un traitement adjuvant « tardif » aux patients opérés par exemple il y a plus de 6 mois ?"

La réponse à cette question n’est pas connue, et nous ne disposons d’aucune étude passée et à venir qui nous permettra d’y répondre directement.

Le principe général serait donc de répondre par la prudence, et de ne pas donner un traitement dont l’utilité n’est pas prouvée à ce stade et surtout pour lequel on ne dispose pas de données concernant le risque de sélection de clones tumoraux résistants.

Il faut rappeler que le risque de rechute décroît avec le temps, que le caractère curatif ou suspensif du traitement adjuvant n’est pas encore établi, que la médiane de survie sans progression après introduction de l’imatinib en phase métastatique est de 24 mois, que l'on retrouve constante dans toutes les études.
On pourrait donc argumenter que débuter un traitement en situation adjuvante « tardive » pourrait correspondre à un traitement en phase métastatique « infraclinique » à un moment ou le patient n’a pas (encore) besoin du traitement… et que l’on brûle ici des cartouches majeures sans objet.

Cependant la réponse à cette question pourra évoluer dans le temps. S’il était par exemple démontré que le temps à la résistance secondaire, en phase métastatique n’était pas affecté par le traitement adjuvant de Glivec…

Affaire à suivre donc, et gageons que comme dans toute situation ou il n’y a pas de données solides, les avis des experts pourront varier...